Lorsqu’on réfléchit à ce qui est nécessaire pour réussir au travail, on pense souvent à des atouts innés : une grande intelligence, la capacité à apprendre, l’ambition d’accomplir des choses et les compétences sociales nécessaires pour développer de solides relations. Mais ces caractéristiques cohabitent toujours avec des faiblesses – des aspects de la personnalité qui peuvent sembler inoffensifs ou même avantageux dans certaines circonstances mais qui, lorsqu’ils ne sont pas maîtrisés, peuvent causer de gros dégâts dans une carrière ou dans une organisation.
Il y a une vingtaine d’années, les psychologues Robert Hogan et Joyce Hogan ont créé un inventaire de ces côtés obscurs de la personnalité -onze qualités allant de nerveux à dévoué qui, poussés à l’extrême s’apparentent aux troubles de la personnalité les plus communs.
Comprendre le côté obscur
Les traits de personnalité du côté obscur peuvent être divisés en trois groupes.
Ceux du premier groupe
Ce sont des traits de mise à l’écart – des choses indéniablement rebutantes qui repoussent les autres. Par exemple, être extrêmement nerveux et lunatique produit cet effet. C’est aussi le cas si vous avez une vision profondément sceptique et cynique, cela complique la construction de la confiance.
Ceux du deuxième groupe
Les traits de caractère de ce groupe sont en revanche des qualités séduisantes – faites pour mettre les autres dans votre poche. On les retrouve souvent chez les leaders sûrs d’eux et charismatiques qui rassemblent des partisans ou gagnent de l’influence sur leurs supérieurs grâce à leur aptitude à manager leur propre hiérarchie. Mais ces traits de caractère peuvent aussi avoir des conséquences négatives, parce qu’ils poussent les gens à surestimer leur propre mérite et à voler trop près du soleil. Etre audacieux et avoir confiance en soi au point d’être arrogant l’illustre bien; tout comme être malicieusement espiègle avec un goût prononcé pour les risques inconsidérés.
Ceux du troisième groupe
Ce groupe comprend les traits de personnalité flatteurs. Cela peut avoir une connotation positive pour les suiveurs, mais c’est rarement le cas lorsqu’il s’agit de décrire des leaders. Par exemple, il se peut qu’une personne assidue essaie d’impressionner son patron par sa méticuleuse attention qu’elle porte aux détails, mais cela peut aussi se traduire par une tendance à être préoccupé par des problèmes insignifiants ou par le micromanagement de ses subordonnées directs. Une personne dévouée et avide de plaire à ceux qui dirigent peut facilement devenir trop docile ou conciliante.
Les traits de caractère obscur diffèrent aussi par leurs conséquences. Il est important de noter qu’une absence totale de ces traits de caractère peut aussi être néfaste. La clé est donc de ne pas faire disparaître les faiblesses de votre personnalité mais de les gérer et de les optimiser : le meilleur résultat est rarement le plus bas ou le plus haut, mais se trouve souvent entre ces deux extrêmes.
Gérer votre côté obscur
L’avancement de votre carrière est fonction de la façon dont les gens vous voient. Même de petites erreurs peuvent causer des dommages significatifs à votre réputation.
Si vous ne pouvez pas réaliser une évaluation psychologique complète pour identifier ce qui peut potentiellement faire dérailler votre carrière, vous pouvez passer une version abrégée du HDS (Hogan Development Survey), ou simplement comparer les types de comportements qui vous caractérisent avec les descriptions élémentaires des traits de caractères présentées dans ce tableau :
Encore mieux : demandez à vos patrons, à vos pairs, à vos subordonnées, à vos clients et vos proches de vous fournir un feed-back honnête sur votre tendance à montrer ou non, ces traits de personnalité. Dites-leur que vous voulez vous améliorer et que vous avez besoin qu’ils soient francs. La clé pour recueillir des informations exactes est d’avoir conscience que les gens éviteront généralement d’émettre des critiques, surtout à propos des leaders, à moins qu’il ne s’agisse de comportements volontairement nuisibles. Donc, outre leur assurer que leurs remarques sincères sont les bienvenues, vous devriez tendre l’oreille pour entendre celles faites de façon subtile ou spontanée.
L’étape suivante consiste à anticiper ce qui peut vous faire dérailler en changeant de comportement. Il se peut que vous avanciez à tâtons jusqu’à y arriver par des approximations successives – en suivant l’évolution de la perception des autres, en procédant à des ajustements, en évaluant plus etc. L’objectif ici n’est pas de reconstruire votre personnalité, mais plutôt de la contrôler dans les situations cruciales.
C’est certain, dompter votre côté obscur n’est pas une mince affaire. La plupart des gens ne désirent pas réellement changer – ils veulent avoir changé. Mais si vous identifiez les traits de caractère qui vous font trébucher, modifiez certains comportements et continuez à procéder à des ajustements en réponse aux feed-back critiques, vous améliorerez grandement votre réputation, ainsi que votre carrière et votre potentiel de leadership.
Extrait du magazine Harvard Business Review France, Le must du développement personnel, par Thomas Chamorro-Premuzic, illustrations : Benoît Tardif